LES COMBATS DE SIDI BRAHIM DU 23 AU 26 SEPTEMBRE 1845
DES HOMMES ET UN LIEU
Cet exposé porte sur les combats qui se déroulèrent du 23 au 26 septembre 1845 opposant les cavaliers de l’Émir aux troupes du lieutenant-colonel de Montagnac. La première partie de ces combats eut lieu sur le Djebel Kerkour et la deuxième partie se passa dans l’enceinte du marabout de Sidi Brahim, d’où la bataille a tiré son nom.
A l’époque, l’Émir s’était installé au Maroc, non loin de Lalla Maghnia, dernière ville algérienne, d’où il sortait pour de rapides et meurtrières attaques contre l’armée française.
La garnison française, elle, se trouvait à Djemmâa-Ghazaouât qui n’était alors qu’une très grande et très belle plage encaissée entre deux falaises et adossée à une jolie colline.
La ville, en telle que telle, n’existait donc pas, mais l’emplacement était stratégique, et Bugeaud, à qui avait était signalé ce lieu qui pouvait s’avérer idéal pour une implantation militaire, était venu l’examiner. Le maréchal, en deux jours, organisa Djemmâa-Ghazaouât, installant un poste provisoire et un magasin pouvant être approvisionné par mer et permettant de ravitailler les troupes de la région.
Mais si Bugeaud n’y voyait qu’un point de logistique, Lamoricière au contraire, était partisan de l’établissement d’un vrai poste, et avait fait même commencer les travaux sous sa direction le 14 septembre 1844, après autorisation ministérielle, sans que le maréchal y mît obstacle.
Lamoricière voulait donner le commandement et l’organisation de ce poste à un chef énergique, courageux et intelligent, et pour cela le confia au lieutenant-colonel de Montagnac François-Joseph-Lucien, âgé alors de 42 ans, et qui était l’un des plus brillants officiers de l’Armée d’Afrique.
Lieutenant-colonel de Montagnac
Mais de Montagnac était ambitieux. La gloire le hantait. Il rêvait de briller, quels qu’en fussent les risques. Le général Cavaignac lui reprochait souvent d’employer des moyens violents et d’outrepasser ses pouvoirs dans ses sorties. C’était aussi un homme impétueux et impatient.
Le rêve glorieux de Montagnac était de capturer l’Émir : mais ce rêve glorieux, est allé s’éteindre dans la mort, pour lui comme pour tant d’autres des soldats sous ses ordres.
(21-22 septembre 1845)
Le 21 septembre, le général Cavaignac se trouvait à Tlemcen alors que le lieutenant-colonel de Barral était cantonné à Nédroma.
Par un hasard des plus malencontreux, ce 21 septembre, le message envoyé par Montagnac à Barral l’informant de la présence de l’Émir et de son souhait de le poursuivre, et celui de Barral adressé à Montagnac, lui demandant de le rejoindre avec sa colonne pour aller épauler le général Cavaignac aux prises avec la tribu des Traras, n’arrivèrent pas à temps.
Chacun des messages fut livré trop tard à son destinataire. Ce fut le capitaine Coffyn, commandant intérimaire de la garnison, qui reçut le message de Barral et l’envoya à Montagnac, comme nous le verrons plus loin.
A réception de la lettre de Montagnac l’informant de sa sortie, Barral réunit un conseil avec ses officiers d’Exéa et Perrin-Jonquières. Barral veut rester sur place, mais d’Exéa propose de rejoindre immédiatement Montagnac, sachant que ce dernier se conformerait à la décision qu’il avait prise et qu’il était perdu s’ils n’allaient pas à son secours.
Barral refuse tout d’abord, puis donne l’ordre pour que la colonne soit prête à partir à 2h, mais à minuit, il changea d’avis et décida de ne porter secours ni au général Cavaignac ni à Montagnac et de rester là où il était.
Mais lorsque quelques soldats, qui étaient parvenus à fuir le lieu du massacre, vinrent le retrouver pour l’informer du drame, tout d’abord il ne les crut pas, persuadé que tous les soldats enfermés au marabout avaient dû être exécutés, puis finit par se décider à aller au secours de Montagnac, mais il était bien trop tard.
De par ses hésitations, son indécision, ses atermoiements et son refus de porter aide à Montagnac, Barral, en ne volant pas au secours de celui-ci, eut une part prépondérante dans la fin tragique de Montagnac et de sa colonne.
Mais il faut aussi préciser que Montagnac était pressé d’en découdre avec l’Emir et qu’il n’avait même pas pris l’élémentaire précaution de vérifier les allégations de celui qu’il pensait être son allié, le caïd Mohamed-El-Trari, chef des Souahlias, tribu puissante ayant fait allégeance à la France, et qui, de ce fait, redoutait la vengeance de l’Emir.
Toujours ce 21 septembre donc, Montagnac reçut le matin, le caïd des Souahlias, venu réclamer le secours des Français et qui s’engageait, si la garnison voulait venir s’embusquer dans sa tribu, à lui livrer Abd-el-Kader, affirmant que l’Emir avait à peine 400 ou 500 hommes avec lui. Ce qui s’avéra faux. Montagnac se rendra compte bien trop tard qu’il se trouvait en face de 2000 à 3000 cavaliers.
Impatient de se battre et résolu à capturer l’Emir coûte que coûte, rejetant toute prudence, et comme il n’avait toujours pas reçu de réponse au message envoyé à Barral l’informant de la présence d’Abd el Kader, et de son souhait d’aller le combattre, Montagnac décida d’aller porter secours aux Souahlias et leur fait parvenir un message en ce sens.
Le dimanche 21 septembre, à 22 heures, Montagnac sort de la garnison, avec une colonne, en y laissant le commandement et la garde de soldats malades ou blessés au capitaine Coffyn.
La colonne est composée de seulement 426 hommes dont :
– 354 chasseurs (9 officiers et 345 hommes) du 8e Bataillon de Chasseurs d’Orléans, aux ordres du chef de bataillon Froment-Coste,
– 67 cavaliers (3 officiers et 64 hommes) du 2e escadron du 2e Régiment de Hussards, aux ordres du capitaine Gentil de Saint-Alphonse. Le détachement de hussards est aux ordres du commandant Courby de Cognord.
CHEF DE BATAILLON FROMENT-COSTE
Dès lors, le prétexte de l’appel au secours du caïd entraîne la colonne française vers le traquenard. A environ 15 km de la garnison, le 1er bivouac est installé pour la nuit, ce 22 septembre. Vers 8h du matin, un messager envoyé par Trari vint les informer que l’Emir s’avançait avec des forces importantes et se dirigeait sur Sidi Bou-Djenane, soit 18 km au Sud du bivouac.
La colonne quitte le bivouac, se dirige vers le Sud et s’arrête près de l’oued Taouli, de 13h à 23h. De nouveaux émissaires envoyés par Trari viennent informer Montagnac que l’Emir n’est qu’à quelques heures de distance et que la tribu va être taillée en pièces s’il ne se hâte pas d’arriver à leur secours.
(23-26 septembre 1845)
Le message de Barral, relayé par le capitaine Coffyn, parvint enfin à Montagnac qui en prit connaissance et apprit ainsi que Barral lui réclamait 300 hommes du 8e bataillon de chasseurs d’Orléans pour aller appuyer le général Cavaignac, en ce moment en opération chez les Traras.
Montagnac, après avoir demandé l’avis de ses deux officiers, le capitaine Froment-Coste et le commandant Courby de Cognord, fait parvenir au capitaine Coffyn une réponse négative. Montagnac estime que le départ de ces 300 hommes obligerait la colonne à revenir à la garnison, ce qu’il considérait comme une honte et une trahison envers ceux qu’il croyait être ses alliés.
A 23 heures, Montagnac lève le bivouac et la colonne se déplace vers Sidi-Moussa El Amber. Le 23 septembre, un bivouac y est installé de 2h00 à 6h30. Mais les estafettes de l’Emir avaient déjà repéré la colonne.
Le 23 septembre 1845
L’ENGAGEMENT DU DJEBBEL KERKOUR
Le 23 septembre, à 6h30, le lieutenant-colonel donne ses ordres et prend avec lui 3 compagnies sur 5 et les hussards pour remonter le ravin de l’Oued Mettous en direction du Kerkour. Le commandant Froment-Coste reste au bivouac avec la compagnie Burgard et la compagnie des carabiniers du capitaine de Géreaux plus 7 hussards.
Les hussards, aux ordres du commandant Courby de Cognord (chef de détachement) et du capitaine Gentil de Saint-Alphonse (commandant le 2e escadron), s’élancent vers le Kerkour. Les cavaliers de l’Emir repérés partent en arrière et se laissent poursuivre, mais des groupes, cachés par les mouvements de terrain, interviennent : ils sont environ deux cents cavaliers.
Abd-El-Kader est sur le Djebel Kerkour et observe les actions successives. Le gros de ses troupes est massé au Sud-Ouest des crêtes et n’attend que l’instant favorable pour agir. A ce moment-là, les hussards sont à l’Est-Nord-Est du Djebel Kerkour et se retrouvent tout à coup environnés par une masse énorme de cavaliers débouchant de tous côtés : les uns arrivent sur la droite de Courby de Cognord, grâce à des ravins qui ont dissimulé leur marche, ce sont les soldats de Khalifa Bou-Hamidi ; les autres surgissent devant son front, en franchissant les crêtes du Djebel Kerkour ; ce sont les fidèles d’Abd-El-Kader, commandés par l’Emir en personne.
Les hussards repoussent à plusieurs reprises les cavaliers ennemis trop nombreux mais ils sont bien vite cernés. Le capitaine de Saint-Alphonse et le lieutenant Klein sont tués. Le commandant Courby de Cognord a un cheval abattu sous lui. Le colonel de Montagnac reçoit une balle dans la poitrine et envoie un hussard demander du secours au commandant Froment-Coste.
Une nouvelle charge de hussards est exécutée et repousse les cavaliers de 100 à 150 mètres. Malheureusement pour les Français, le combat se morcelle et des charges partielles ont lieu par quatre ou par six. Des isolés se défendent individuellement jusqu’à ce qu’ils soient tués ou pris.
Les trois compagnies de chasseurs arrivent, officiers en tête, sur les flancs des cavaliers encerclant les hussards. Elles prennent position et forment le carré, aux ordres du capitaine de Chargère, dans le plus grand ordre. Les audacieux soldats d’Abd-El-Kader se ruent sur cette forteresse vivante, mais 300 baïonnettes vont trouer les poitrines de ces courageux soldats.
Soudain, sur la plus haute crête, on voit flotter le drapeau blanc d’Abd-El-Kader qui descend de la montagne comme une avalanche, au galop de son cheval. Sa vue produit sur ses combattants l’effet d’une commotion électrique et le combat recommence avec une nouvelle fureur.
Cela faisait un peu plus d’une heure que le combat durait. De Montagnac meurt parmi les derniers hussards qui résistent fermement. La 2e compagnie du capitaine Burgard, le clairon Rolland, le capitaine Dutertre et le commandant de Chargère arrivent au pas chasseurs
Ils sont une soixantaine et forment aussitôt le carré dans le secteur du marabout de Sidi-Tahar. Dès les premiers engagements, le commandant est tué. La compagnie change de position pour la troisième fois et reforme le carré autour du capitaine Burgard qui vient d’être blessé mortellement
C’est alors que le commandement revient à l’adjudant Thomas et il ne leur restait plus que la baïonnette pour se défendre. Usant aussitôt de cette arme, ils firent reculer la cavalerie de l’Emir de 50 à 60 mètres mais ils n’étaient plus qu’une quinzaine à peine à se battre, cernés par cette dernière.
Au bout d’une heure de combat (vers midi), les derniers survivants sont faits prisonniers dont le capitaine Dutertre, l’adjudant Thomas, le maréchal des logis Barbut et le clairon Rolland.
LE MARABOUT DE SIDI BRAHIM
Vers 11h00, il ne reste plus du 8e bataillon de chasseurs d’Orléans que la compagnie de carabiniers du capitaine de Géreaux, trois escouades de la 3ème compagnie et le caporal Lavayssière, soit environ 80 fusils. Les cavaliers de l’Emir arrivent à toute vitesse et de Géreaux, voyant le danger, décide d’abandonner le camp et de se retrancher dans le marabout de Sidi-Brahim.
Le lieutenant Chappedelaine instaure la défense du marabout et organise un dispositif en plaçant 20 carabiniers, chasseurs et hussards sur chaque côté. Les dispositions de combat de défense sont données, un genou à terre. Le capitaine s’installe au centre du dispositif avec l’interprète Lévy.
Les vainqueurs des hussards et chasseurs entourent le marabout et l’assaut commence. Repoussés, les cavaliers de l’Emir reviennent à la charge avec une nouvelle audace et l’assaut reprend avec une furie grandissante, se ruant avec une témérité incroyable sur les fragiles remparts. La lutte se poursuit pendant plus d’une heure. Abd-El-Kader parcourut le lieu du carnage et rendit hommage à la valeur des chrétiens et à ses propres cavaliers qui, combien de fois sous ses yeux même, avaient fait vaillamment leurs preuves.
PREMIERE SOMMATION
Abd-El-Kader envoie une lettre écrite par l’adjudant Thomas au capitaine de Géreaux en lui promettant la vie sauve, ainsi qu’à ses compagnons s’ils se rendaient, mais ce dernier répondit simplement que les chasseurs d’Orléans ne se rendent pas. Un nouvel assaut est donné mais il est aussitôt repoussé.
DEUXIEME SOMMATION
L’Emir envoie aux assiégés un émissaire qui leur transmet une seconde lettre leur disant à nouveau que toute résistance étant inutile et tout secours chimérique, si le capitaine français et les siens déposaient les armes, ils auront la vie sauve, mais le capitaine fait répondre que ses chasseurs et lui sont sous la garde de Dieu et qu’ils attendent l’ennemi de pied ferme.
TROISIEME SOMMATION
L’Emir renvoie un nouveau messager, demandant aux combattants de se rendre immédiatement sous peine des pires représailles. De Géreaux ne peut répondre lui-même, étant blessé tout comme le lieutenant Chappedelaine. Un troisième refus est de nouveau opposé à l’Emir. Les assiégés subirent une nouvelle attaque qui est une nouvelle fois repoussée.
LE CAPITAINE DUTERTRE
Abd-El-Kader demande au capitaine Dutertre d’aller lui-même jusqu’au marabout pour engager ses camarades à se rendre, à condition qu’il donne sa parole d’honneur de revenir, et qu’en cas de refus des assiégés, il aura la tête tranchée quand il reviendra.
Le capitaine Dutertre lui donne sa parole et part vers les quatre-vingt hommes qui l’attendent sur leurs murailles. Mais il les exhorte à ne pas se rendre et à continuer le combat, devrait-il pour cela être décapité. Il retourne au camp où il aura effectivement la tête tranchée. Sa tête aurait été triomphalement présentée devant les murs du marabout…
LE CLAIRON ROLLAND
L’Emir fait venir le clairon Rolland (prisonnier au marabout de Sidi-Tahar) et lui intime l’ordre de sonner la retraite. Rolland, à pleins poumons, sonne la charge sachant par avance qu’il va être décapité. Le hasard en a voulu autrement et il a eu la vie sauve.
LES PRISONNIERS
Abd-El-Kader fait venir un groupe de dix prisonniers. Il pense entamer le moral des résistants et leur arracher la capitulation. Parmi les prisonniers, Lavayssière reconnaît un compatriote du Midi, et lui crie en patois de se coucher, lui et ses camarades. En même temps, qu’il se jette à terre ce dernier fait coucher ses camarades prisonniers. Les chasseurs du marabout tirent des feux terribles sur l’escorte et sur l’entourage de l’Emir. Le résultat est net : des gardiens de l’escorte sont tués ou blessés grièvement. Des dignitaires, à 700 ou 800 mètres du marabout, n’échappent pas à la fusillade, l’Emir est lui aussi touché à l’oreille
Dès la fusillade terminée, trois charges sont lancées contre le marabout et c’est un nouvel échec. L’Emir décide de quitter le champ de bataille et laisse en place 7 postes de 50 hommes autour du marabout.
LES COULEURS SUR LE MARABOUT
Vers 16h00, de Géreaux aperçoit de loin un groupe de cavaliers. Il pense à la colonne de Barral qui, avec le 10e bataillon de chasseurs d’Orléans, opère non loin de là. Il veut attirer son attention et pour cela il imagine de faire confectionner un drapeau. Lavayssière prend alors sa cravate bleue de chasseur, la ceinture rouge du lieutenant Chappedelaine et le mouchoir blanc du capitaine de Géreaux avec lequel il fabrique un drapeau ; un roseau servit de hampe à laquelle il fut fixé et qui, ensuite, fut attaché en haut des figuiers.
LE 24 SEPTEMBRE 1845
Le 24 septembre, au lever du soleil, l’Emir vient lui-même en personne à la tête de ses réguliers, cavaliers et infanterie et les attaques recommencent. La cavalerie perd beaucoup de monde, mais n’arrive pas à déloger les assiégés. A 10H00, le combat reprend encore plus furieux mais aucun des soldats de l’Emir ne peut franchir le retranchement. Abd-El-Kader, sachant les soldats assiégés épuisés par une lutte acharnée de trois jours, sans munitions et sans vivres et les croyant incapables de sortir de leur enceinte, fait sonner la retraite, part avec ses troupes, laissant seulement 450 hommes pour les surveiller, comptant sur la famine plus puissante que ses armes pour achever son œuvre.
le 25 septembre, à 8H00, un nouvel assaut se prépare, encore plus furieux. Une première salve fait un énorme dégât : les hommes de l’Emir sont stoppés net dans leur offensive. Mais ils repartent à la charge. Ils en viennent cette fois au corps à corps, à la baïonnette, au jet de pierres et au sabre.
Les assiégés doivent économiser leurs cartouches, ce qui explique les jets de pierres. Ils n’ont plus rien à boire ni à manger et sont obligés de boire leur urine mélangée à de l’absinthe. Leur situation n’est pas brillante. Il n’y a plus d’eau depuis bien longtemps, des vivres encore moins. Les combattants ont pourtant un moral d’acier et demandent à leur capitaine de tenter une sortie. De Géreaux donne son accord. Lavayssière en profite pour récupérer son drapeau criblé de balles.
LE 26 SEPTEMBRE : LE RETOUR DRAMATIQUE
Le vendredi 26 septembre, à 6H00, les 73 chasseurs et hussards, emportant 7 blessés avec eux, sortent discrètement en dehors du marabout, côté nord. Les murs sont franchis sans bruit et rapidement. Le 1er poste est enlevé. Les hommes de l’Emir sont stupéfaits par tant d’audace. Les chasseurs, carabiniers et hussards forment aussitôt un carré et partent vers le nord, en direction de la garnison. Il ne fallait pas moins de cinq heures pour gagner Djemmâa-Ghazaouât au pas.
LE PREMIER CARRE
Ce premier carré passe par le versant Sud du Koudiat. A la hauteur du village de Tient, les habitants assaillent le carré et font 5 à 6 blessés.
LE DEUXIEME CARRE
C’est le premier arrêt du détachement. Il dure 10 minutes et coûte la vie à trois chasseurs. Le capitaine de Géreaux sent sa fin proche et tend ses 4 cartouches au carré qui se forme et la troupe repart dans la direction de Djemmâa-Ghazaouât. Le drapeau de fortune du marabout flotte haut.
Le village d’Ouled-Ziri était en ébullition ; il se préparait à descendre la côte vis-à-vis des survivants pour leur couper la retraite.
Le carré continue sa progression et descend en direction de l’oued Mellah et le traverse. Arrivés à ce point, beaucoup de chasseurs sont tués, car les villageois pouvaient tirer sur eux à loisir de tous côtés, les survivants ayant épuisé leur dernière cartouche.
Enfin, ils gagnèrent le bas du ravin et formèrent un troisième carré dans les figuiers. Ils n’étaient plus que quarante hommes, le lieutenant de Chappedelaine ayant été tué entre le premier et le deuxième carré ; au milieu du dernier étaient encore debout le capitaine, le chirurgien et l’interprète. Le capitaine de Géreaux donne l’ordre de la retraite. L’interprète Lévy est fait prisonnier.
LE TROISIEME CARRE
Le capitaine de Géreaux, pour la troisième fois, ordonne de former le carré. Vingt-cinq hommes à peu près sont encore debout, mais ils tombent bientôt, fusillés à bout portant malgré les protestations du cheik des Ouled-Ziri, El-Hadj-Kadour-Ben-Hocein.
Il n’y avait plus aucun officier vivant, aucun chef, excepté le caporal Lavayssière qui avait encore sa carabine, alors que les quelques survivants étaient désarmés. Il leur fallait gagner Djemmâa-Ghazaouet à grand pas ; se frayant un passage à coups de baïonnettes à travers la mêlée de l’ennemi qui achevait sans pitié ceux qui tombaient sous ses coups.
Au bilan, de la colonne Montagnac qui comptait 426 hommes, il ne restait plus que 16 survivants, 16 braves, dont 5 moururent un peu plus tard. Le total des survivants arrivant à la garnison, le 26 septembre, s’élève donc à 11 soldats, aucun officier n’ayant survécu. 95 Français sont prisonniers de l’Emir dont le commandant Courby de Cognord.
LES DERNIERS SURVIVANTS DE SIDI BRAHIM
Il faut aussi savoir que lorsque l’Emir Abd-el-Kader a appris le massacre par la population d’Ouled-Ziri, il leur a fait connaître son mécontentement et son déplaisir. il fut très en colère contre les villageois, leur faisant porter le message suivant : « Je fais la guerre aux soldats, mais je n’achève pas les blessés ».
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Lettre écrite par un soldat à son père vivant en France et lui racontant la tragédie de Sidi Brahim.
Un document très rare, car on trouve plus de lettres d’officiers que de simples soldats.